Venant de Saint-Denis
de la Réunion, mais né à Saint-André,
Julien SAMORI (n°2) s'engage volontairement dans l'Armée, et
est affecté de juillet 1900 à avril 1902 à Madagascar. Démobilisé, il
retourne à la Réunion, mais n'y reste que six mois. Sans doute
intéressé par sa première expérience, il revient à Madagascar, plus
précisément à Tamatave, le 28 octobre 1902.
Il est alors âgé de 24 ans, et exerce le métier de tailleur
d'habits, sans doute déjà pour l'Armée française, mais en tant que
civil. Dans les années 1910, il
a deux filles prénommées Julienne et Marguerite.
Le 14 mai 1914, six mois avant qu'éclate la première guerre mondiale,
Julien se rengage avec le grade de caporal dans le 3e régiment de tirailleurs
malgaches. Il a 35 ans, et conserve sa spécialité de tailleur d'habits. Son
régiment étant affecté à Diégo-Suarez,
il le suit, mais il effectue aussi un détour en France à partir de
1915. Il est notamment caserné à Cherbourg, où des régiments
coloniaux transitent. Pour une raison inconnue à ce jour (décès
de sa première femme ?), il est rapatrié avant
la fin des hostilités, puisqu'il se marie fin 1917 à Madagascar. Il
avait toutefois le grand sens du patriotisme, et était décoré de
plusieurs médailles militaires. En 1939, il se présentera encore au bureau de l'enrôlement.
Mais âgé de 60 ans, il fut refusé : "Retournez chez vous
monsieur Samori !", lui aurait-on déclaré, à sa grande
déception, mais aussi au grand soulagement de sa famille.
Les
tirailleurs malgaches
Dès le 17e siècle, des troupes armées spécifiques
sont affectées à la protection des territoires conquis par la France. Elles
sont d’abord recrutées en métropole, puis progressivement dans les colonies
même, en distinguant les colons français et les indigènes. Tous volontaires,
ces soldats indigènes reçoivent une prime d’engagement. Leur nombre
s’accroissant à la fin du 19e siècle, ils s’organisent en plusieurs corps
avec en 1894 plusieurs régiments de tirailleurs sénégalais, soudanais,
annamites, tonkinois, malgaches, une compagnie de Cipahis en Inde… Avec le décret
de décembre 1900, ils comprennent à Madagascar :
·Le 3e régiment
de tirailleurs sénégalais à Majunga.
·Un
bataillon d'infanterie coloniale à Diégo-Suarez.
·Trois régiments
de tirailleurs malgaches : 1er à Tananarive, 2e à Fianarantsoa, 3e à
Diégo-Suarez.
D’autres corps seront créés par la suite avec
notamment à Diégo-Suarez : le 7e régiment d'artillerie coloniale et la
11e compagnie d'ouvriers. Par ailleurs, un bataillon de quatre compagnies de
Volontaires Réunionnais est créé en mars 1895 lors de la reprise d’hostilités
à Madagascar.
Pendant
la Grande Guerre, les troupes coloniales sont divisées en six groupes et un
corps d’occupation (en Chine). Madagascar constitue le groupe d’Afrique
orientale commandé par le gouverneur de l’île, avec un quartier général à
Tananarive. Elle fournit 45.800 hommes, dont 41.000 pour les unités
combattantes en Europe. Les premiers régiments partent le 9 octobre 1915. Ils
sont pour la plupart acclimatés dans le sud de la France, dans un camp près de
Fréjus, avec d’autres troupes indigènes d’Afrique et d’Asie. Ils
rejoignent ensuite le front dans le nord de la France. Les tirailleurs malgaches
s’illustrent surtout en mai-septembre 1918, près de Soissons. Ils contribuent
à refouler les allemands vers l’Est. Environ 2.400 sont « morts pour la
France » (près de 10.000 malgaches selon certaines sources). Au total,
les troupes coloniales fournissent un quart des combattants français en Europe.
Parmi les célébrités, l’aviateur Roland Garros, né à Saint-Denis de la Réunion en
1888, est tué dans les Ardennes en 1918.